Des traces de vie dans la météorite
martienne de Tissint ?
Presque 20 ans après l’annonce de
la découverte de possibles traces de vie dans la météorite martienne ALH84001,
une équipe internationale de chercheurs vient de relancer les spéculations.
Cette fois, elles viennent de la composition de la météorite de Tissint où de
la matière carbonée a été trouvée.
Le 05/12/2014 à 13:29 - Par Laurent Sacco,
Futura-Sciences
En 1996, une équipe de chercheurs
de la Nasa faisait une annonce tonitruante. En examinant une
météorite d’origine martienne récoltée en 1984 dans les glaces de l’Antarctique, ALH84001, ces scientifiques y avaient vu des structures
évoquant des nanofossiles de bactéries. On y trouvait aussi des nano cristaux de magnétite (Fe3O4) et de sulfures de fer ressemblaient en effet à ceux synthétisés par des
bactéries terrestres dites magnétostatiques. S’y ajoutaient enfin d’autres observations qui
laissaient penser que la météorite ALH84001 constituait la première preuve
d’une trace de vie sur la Planète rouge, au moins dans un passé lointain. Mais
il a fallu déchanter.
Aujourd’hui, l’intérêt pour une
preuve de l’apparition de la vie sur Mars issue d’une météorite vient d’être
relancé par une publication dans Meteoritics and Planetary
Sciences. Elle porte sur des analyses de la météorite de Tissint, une shergottite,
c’est-à-dire une représentante d’une des trois grandes classes principales de
météorites martiennes (ALH84001 n’en fait pas partie). Elles tirent leurs noms
des localités à proximité desquelles des Hommes ont assisté à leur chute :
celle observée près du village français de Chassigny en 1815, celle de
Shergotty en Inde (1865) et celle de Nakhla, en Égypte (1911). Elles ont donné
le qualificatif SNC (les initiales de ces villes) désignant la quinzaine de
météorites de ce type ramassées sur Terre.
De multiples raisons conduisent à leur attribuer une origine martienne, à la suite d’impacts d’astéroïdes ou de comètes. Il y a d’abord le fait qu’elles possèdent toutes une composition particulière d’isotopes stables de l’oxygène (17O et 18O) qui les distinguent des autres météorites. Les bulles de gaz incluses ont une composition identique à celle de l’atmosphère martienne mesurée par les sondes Viking en 1976. Surtout, les SNC sont en général des roches qui ont cristallisé à partir de magmas il y a environ 500 millions d’années, voire moins. Les astéroïdes de grandes tailles avaient déjà épuisé leurs réserves d’éléments radioactifs et de chaleur d’accrétion. En dehors de la Terre, seules Vénus et Mars pouvaient donc encore être volcaniquement actives à cette époque, et la gravité de Mars est suffisamment faible pour permettre des éjections de blocs rocheux à la suite d’un impact de petits corps célestes.
Une activité biologique martienne trahie par un
isotope du carbone ?
La météorite de Tissint est
arrivée sur Terre, plus précisément dans le désert du Maroc, le 18 juillet
2011. Ses fragments ont été analysés depuis par plusieurs laboratoires de par
le monde. L’équipe internationale qui l’a étudiée s’est penchée sur la nature
et l’origine de la matière carbonée qui emplit des cavités de la météorite. On
a pu montrer qu’il ne pouvait pas s’agir d’une contamination d’origine
terrestre. Pourrait-il s’agir de traces laissées par une activité biologique
sur Mars ? C’est à cette question qu’ont voulu répondre Philippe Gillet, directeur du Laboratoire des sciences de
la Terre et des planètes de l’EPFL (École Polytechnique Fédérale de Lausanne),
et ses collègues.
Les cosmochimistes sont arrivés à
la conclusion que l’abondance d’un isotope de carbone, 13C,
trouvé dans la météorite ne cadrait pas avec l’idée d’infiltration dans les
fissures d’un liquide contenant du carbone d’origine non biologique. Elle est
en effet nettement inférieure à celle mesurée par les sondes Phoenix et Curiosity dans le gaz carbonique de
l’atmosphère de Mars. En revanche, on trouve un désaccord similaire sur Terre
entre le charbon et le CO2 de l’atmosphère.
D’autres observations soutiennent l’hypothèse que la matière carbonée de
Tissint n’est pas d’origine abiotique.
Toutefois, Philippe Gillet tient
à modérer l’enthousiasme que peut déclencher cette découverte. Selon le
chercheur : « il est délicat d’assener des certitudes, surtout dans un
domaine aussi sensible. Je suis ouvert à ce que d’autres études viennent nous contredire. Mais nos conclusions sont
toutefois de nature à relancer activement le débat consacré à l’existence
possible d’une activité biologique sur Mars, du moins dans le passé ».
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