Ovni : Un enquêteur du Geipan – Gilles Munsch -
vous explique ce que vous pouvez voir dans le ciel
Émilie Jehanno
Publié le 02/07/2023
Une lueur dans le ciel, un objet volant étrange ? Sur les réseaux
sociaux, une vidéo peut vite faire le tour et être associée à
des extraterrestres, comme “cet objet volant” vu au-dessus d’une ville du
Mexique, le 25 juin. Il existe en France un service très sérieux qui se
charge d’enquêter sur ces phénomènes aérospatiaux non identifiés (PAN). Pour la
journée mondiale des ovnis, le 2 juillet, 20 Minutes vous
raconte comment travaillent les enquêteurs du Groupe d’études et d’informations
sur les phénomènes aérospatiaux non identifiés (Geipan). Et vous dévoile
les principales explications de ces phénomènes étranges.
Passionné d’astronomie, Gilles Munsch est tombé dans la marmite de
l’ufologie il y a quarante-cinq ans. Aujourd’hui, à 68 ans, l’ingénieur de
formation, enseignant à la retraite, est enquêteur bénévole pour le Geipan
depuis 2007. Ce service du Centre national d’études spatiales (Cnes), mis
en lumière dans la série Ovni(s) en 2021, fonctionne avec quatre
temps pleins et une équipe d’une vingtaine d’enquêteurs bénévoles. Entre 600 et
700 sollicitations sont reçues chaque année. Pour une centaine, une enquête est
ouverte.
Dossiers classés « D »
C’est alors qu’entre en scène Gilles Munsch ou un autre enquêteur,
missionné par le Geipan. Ils peuvent aller aux quatre coins de la France pour
essayer de trouver une explication à un phénomène observé. Une première enquête
avec une analyse à distance est menée, à partir de sources disponibles en
ligne.
Il s’agit de procéder avec méthodologie, en se basant sur les connaissances
scientifiques actuelles et les phénomènes aérospatiaux connus. Les enquêteurs
peuvent s’appuyer sur un collège d’experts et des interlocuteurs externes comme
la gendarmerie nationale, l’armée de l’air, l’aviation civile, la Marine,
Météo-France ou la communauté scientifique (CNRS, CEA, etc.). Au final,
environ 3,5 % des dossiers ne trouvent pas d’éclaircissement et sont
classés « D », cas encore ouvert après enquête.
« Ne pas reconnaître la Lune »
Une des principales sources d’explication, ce sont tout simplement les
phénomènes astronomiques. « Ça peut paraître surprenant, mais les gens
peuvent, en toute bonne foi, ne pas reconnaître la Lune, souligne Gilles
Munsch, notamment quand ils sont dans un véhicule et qu’ils roulent », par
exemple. Cela se produit aussi avec Vénus ou d’autres astres, planètes,
étoiles, météores, comètes.
Comment les enquêteurs savent-ils qu’un témoin a vu Vénus ?
« Pour l’astronomie, c’est presque le plus facile, explique Gilles Munsch,
qui se souvient d’une époque où les calculs étaient effectués à la main.
Maintenant, on a des logiciels d’astronomie qui nous permettent d’avoir des
cartes du ciel, de trouver en quelques minutes la position des astres,
n’importe quelle planète, étoile ou objet céleste. »
Et même des satellites, car beaucoup peuvent, en effet, créer des méprises,
notamment les Starlink d’Elon Musk. Ces informations sont
enregistrées par les agences spatiales, les radars. « Si le témoignage est
suffisamment précis, avec une heure, des directions d’observation, la
localisation du témoin, on ne met pas très longtemps à trouver la
solution », assure l’enquêteur bénévole.
Cartes radars de l’armée de l’air
De nombreux phénomènes sont aussi aéronautiques, ce sont des engins qui
volent, comme les avions civils ou militaires qui manœuvrent à basse altitude,
des ULM, des montgolfières, des ballons à gaz, des ballons fantaisie, etc.
« Ils se baladent dans l’air de façon plus ou moins contrôlée, plus ou
moins officielle et ne sont pas forcément répertoriés », pointe Gilles
Munsch. Là, les enquêteurs peuvent consulter Fly Radar pour essayer de
retrouver la trajectoire d’un avion civil ou font appel à l’armée de l’air pour
avoir accès aux cartes radars.
Et enfin, il y a des méprises avec des véhicules ou objets terrestres qui
émettent une lumière puissante la nuit. Au rang des coupables :
moissonneuses-batteuses dans un champ, voitures, camions, grues, projecteurs de
boîtes de nuit, etc. « On essaie de voir tout ce que l’activité
humaine a pu engendrer comme activité autour du témoin, » détaille-t-il.
Cette activité peut être inhabituelle, mais les conditions météo peuvent jouer
un rôle aussi dans ce qui a été observé. Les outils Géoportail ou Google Maps permettent
de repérer ce qu’il y a dans l’environnement du témoin (industries, terrains
sportifs ou d’aviation, champs d’exercice).
Un nouveau phénomène
En 2022, le Geipan a ajouté un nouveau phénomène à sa liste : la
vision entoptique. Dans de rares cas, ce que le témoin perçoit comme faisant
partie de la scène observée est en réalité des éléments internes de son œil,
qui se superpose à la scène réelle. C’est Gilles Munsch qui a éludé ce mystère.
En août 2022, une artiste de la région parisienne signale un étrange
phénomène au Geipan : à travers les jumelles qu'elle a hérité de son père, elle
observe régulièrement des lumières bizarres dans le ciel. Elle en a rempli des
carnets de dessin. Mais l’enquêteur en charge de son dossier ne parvient pas à
trouver d’explication. C’est au cours d’une réunion avec ses collègues que
Gilles Munsch rapproche ce cas d’un autre qu’il avait identifié en 1995,
avant de rejoindre le Geipan.
« Le cerveau observe bien quelque chose de réel »
Deux enquêteurs sont retournés chez l’artiste un soir pour regarder avec elle ce qu’elle voyait. Ce qui a permis de confirmer l’hypothèse de Gilles Munsch de la vision entoptique. Le phénomène a été étudié à la fin du XIXᵉ siècle par des chercheurs en physiologie de l’œil, mais il reste peu connu.
Autre
dessin d'observation d'un phénomène de vision entoptique. - Geipan/Anne de
Giry
« Ce n’est pas une illusion d’optique, souligne Gilles Munsch. Le
cerveau observe bien quelque chose de réel, mais qui se trouve dans les
yeux. » Comment ça se produit ? Tous les cas en ufologie jusqu’à
présent s’expliquent par des jumelles ou une lunette astronomique mal réglée.
« L’instrument étant défocalisé, au lieu d’avoir des rayons qui arrivent
parallèles à la direction d’observation, ces rayons lumineux vont partir dans
toutes les directions et vont éclairer l’œil de façon divergente,
détaille-t-il. C’est là que le phénomène se produit, on va pouvoir observer des
ombres de différents éléments qui se trouvent dans l’œil », comme des
défauts de la rétine, du cristallin, des corps flottants dans le
vitré, etc.
Sur l’image observée, un faisceau d’ombre va apparaître que le cerveau
n’est pas capable d’éliminer parce qu’il est surpris. Et ce faisceau va se
superposer à la scène observée. C’est pour résoudre ces mystères scientifiques
que Gilles Munsch se passionne pour l’ufologie, « sans idéologie ou idée
préconçue sur ce que peut être un cas ». Fera-t-il un jour une rencontre
du troisième type ? « Je n’ai jamais vu d’extraterrestres et je
pense, je suis même certain, que je quitterai ce monde sans en avoir vu »,
s’amuse-t-il.
Émilie Jehanno
QUI EST EMILIE JEHANNO
Diplômée du Cuej à Strasbourg en 2013, j'ai été éditrice ou rédactrice pour divers médias (« Guyaweb », « Causette », « Reporterre », etc.). J’ai rejoint «20 Minutes » en 2020, d’abord à l’édition, puis, en 2022, à la rubrique Fake Off. Je suis spécialisée sur les enjeux de désinformation et d'écologie.Son parcourt – Formation
Université Paris-Saclay - Université Paris-Saclay
Master 2 (M2), Climat et médias Master 2 (M2), Climat et médias oct. 2023 - sept. 2024 oct. 2023 - sept. 2024
Centre universitaire d'enseignement du journalisme – Cuej - Centre universitaire d'enseignement du journalisme
Master 2 Journalisme, presse écrite et multimédia Master 2 Journalisme, presse écrite et multimédia 2011 – 2013 2011 – 2013
- Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne - Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Master 2, Histoire des sociétés occidentales contemporaines - Master 2, Histoire des sociétés occidentales contemporaines 2010 – 2011 2010 – 2011
- Université libre de Bruxelles Université libre de Bruxelles
Master 1 (M1), Histoire contemporaine
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